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et chrétienne, tranchera sans doute la question aux yeux des gens qui méditent quelque peu les chartes constitutionnelles, et, comme nous ne parlons pas à d’autres, nous poursuivrons.

Depuis que les sociétés existent, un gouvernement a donc toujours été nécessairement un contrat d’assurance conclu entre les riches contre les pauvres. La lutte intestine produite par ce prétendu partage à la Montgomery allume chez les hommes civilisés une passion générale pour la fortune, expression qui prototype toutes les ambitions particulières ; car du désir de ne pas appartenir à la classe souffrante et vexée dérivent la noblesse, l’aristocratie, les distinctions, les courtisans, les courtisanes, etc.

Mais cette espèce de fièvre qui porte l’homme à voir partout des mâts de cocagne et à s’affliger de ne s’y être juché qu’au quart, au tiers ou à moitié, a forcément développé l’amour-propre outre mesure et engendré la vanité. Or, comme la vanité n’est que l’art de s’endimancher tous les jours, chaque homme a senti la nécessité d’avoir, comme un échantillon de sa puissance, un signe chargé d’instruire les passants de la place où il perche sur le grand mât de cocagne au sommet duquel les rois font leurs exercices. Et c’est ainsi que les armoiries, les livrées, les chaperons, les cheveux longs, les girouettes, les