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DE LA DÉMARCHE

principes que les hommes minutieux prouvent, expliquent et commentent.

L’observation des phénomènes relatifs à l’homme, l’art qui doit en saisir les mouvements les plus cachés, l’étude du peu que cet être privilégié laisse involontairement deviner de sa conscience, exigent et une somme de génie et un rapetissement qui s’excluent. Il faut être à la fois patient comme l’étaient jadis Muschenbrock et Spallanzani, comme le sont aujourd’hui MM. Nobili, Magendie, Flourens, Dutrochet et tant d’autres ; puis il faut encore posséder ce coup d’œil qui fait converger les phénomènes vers un centre, cette logique qui les dispose en rayons, cette perspicacité qui voit et déduit, cette lenteur qui sert à ne jamais découvrir un des points du cercle sans observer les autres, et cette promptitude qui mène d’un seul bond du pied à la tête.

Ce génie multiple, possédé par quelques têtes héroïques justement célèbres dans les annales des sciences naturelles, est beaucoup plus rare chez l’observateur de la nature morale. L’écrivain, chargé de répandre les lumières qui brillent sur les hauts lieux, doit donner à son œuvre un corps littéraire, et faire lire avec intérêt les doctrines les plus ardues, et parer la science. Il se trouve donc sans cesse dominé