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touchant votre désintéressement et la sincérité de votre douleur conjugale.

Le spectacle finit sans autre incident, monsieur de Rhétoré se sépara de monsieur de Ronquerolles. Alors, celui-ci aborda avec beaucoup de courtoisie monsieur Dorlange, et essayant de quelque conciliation, il lui fit remarquer qu’eût-il raison au fond, son procédé avait été blessant, insolite ; monsieur de Rhétoré, d’ailleurs, avait fait preuve d’une grande modération, et certainement il se contenterait de la plus simple expression de regret ; enfin, tout ce qui peut se dire en pareille occasion.

Monsieur Dorlange ne voulut entendre parler de rien qui ressemblât à une soumission, et le lendemain, il recevait la visite de monsieur de Ronquerolles et du général Montriveau, venus de la part de monsieur de Rhétoré.

Ici nouvelles instances pour que monsieur Dorlange consentît à donner une autre tournure à ses paroles. Mais votre ami ne sortit pas de cet ultimatum : — Monsieur de Rhétoré veut-il retirer les paroles que je me suis vu dans la nécessité de relever ? alors, moi, je retirerai les miennes.

— Mais c’est impossible, lui objectait-on : Monsieur de Rhétoré est personnellement offensé ; vous, au contraire, vous ne l’êtes pas. À tort ou à raison, il a la conviction que monsieur Marie-Gaston lui a porté un dommage. Il faut toujours une certaine indulgence pour les intérêts blessés ; jamais on n’obtient d’eux une justice absolue.

— De telle sorte, reprenait monsieur Dorlange, que monsieur le duc continuera de calomnier mon ami tout à son aise ; d’abord parce qu’il est en Italie, et ensuite parce que Marie-Gaston aura toujours une extrême répugnance à en venir avec le frère de sa femme à de certaines extrémités. C’est justement, ajoutait-il, cette impuissance relative où il est de se défendre, qui constitue mon droit, je dis plus, mon devoir d’intervenir. Ce n’est pas sans une permission particulière de la Providence que j’ai été à même de saisir au passage quelques-uns de ces méchants propos qui circulaient sourdement, et puisque monsieur le duc de Rhétoré