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par le remords, bien que la joie d’avoir réalisé la pensée de toute sa vie fût encore la plus forte, Tobias n’avait pas encore osé faire l’essai de l’instrument qu’il avait achevé, et pourtant une merveilleuse harmonie y était cachée ; car lorsque l’air seulement venait à passer dessus, des soupirs d’une incroyable douceur s’en exhalaient. Le bruit à la fin commença à se répandre que Tobias avait découvert son grand secret ; et chaque jour tout ce qu’il y avait de musiciens dans la ville venait savoir, les uns pour se rire du rêveur, les autres avec une curiosité plus sérieuse, à quand l’audition du violon-miracle, et Tobias reculait toujours, sous prétexte que son œuvre n’était point finie.

Il advint pourtant que l’héritier présomptif d’une petite principauté de l’Allemagne passa par la ville. La Providence, qui apparemment avait eu ses raisons pour cet arrangement, le destinant à régner un jour, lui avait donné toutes les qualités requises pour être un excellent violon solo. Sa réputation de virtuose s’était répandue dans toute l’Europe, à peu près comme la renommée militaire du grand Frédéric, et il ne s’arrêtait guère en un pays qu’on n’organisât