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REINE D’ARBIEUX

le séparaient d’elles, mais le bruit des conversa­tions ne lui permettait pas d’entendre leurs voix. Que se disaient-elles ? Il avait l’impression qu’elles parlaient de lui ; quelque chose se troublait au fond de son être à cette pensée, éveillant un malaise insupportable.

Deux ou trois fois, Sourbets avait fait un signe à Reine pour lui rappeler qu’il voulait partir. Mais leurs yeux ne parvenaient pas à se rencon­trer. Où était le fluide qui réunit par d’invisibles étincelles les êtres qui s’aiment ? Un peu échauffé par les vins et par le cognac, Sourbets commen­çait à voir les choses comme elles apparaissent dans la colère. Prétexte sans doute que cette con­versation pour le retenir contre son gré. Est-ce qu’il ne pouvait pas supporter même l’intimité de Reine avec sa cousine ? Il ne le pouvait pas, ou tout au moins il paraissait, au fur et à mesure que passait le temps, de plus en plus rembruni et irrité.

Peut-être aurait-il patienté encore, en rongeant son frein ; mais c’est à ce moment que Marie Lavazan s’était glissée entre des groupes. Aurait-elle l’indélicatesse d’aller s’asseoir à côté de Reine ? Elle y allait ! C’était plus que Sourbets ne pouvait supporter : quelle intention l’amenait là, quelle hypocrisie, quel message ?

S’il avait cédé à son mouvement, il eût appelé sa femme à l’instant même. Que lui importait de paraître brusque et maladroit ! Il était le maître. Mais sa passion le retenait, ce démon cruel du