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L’adieu les jetait aux bras, l’un de l’autre ! Devant les images qui chauffaient ses yeux, une fureur l’envahissait : contre cette vieille femme, qui ne songeait qu’à ses champs et à son bétail ; contre lui-même qui devait se taire. Qu’attendait l’orage pour éclater et le feu du ciel pour rabattre vers la maison le couple invisible ? Que Mme  Fondespan ne s’en inquiétât pas, cela montrait le peu d’importance qu’elle donnait à cette amitié. Il était évident que Régis, dans ses calculs, ne comptait pour rien. Germain maudissait cette femme endurcie, peut-être incrédule aux choses de l’amour, et que la maternité n’avait pas éclairée de son feu secret. Comme c’est la manie des êtres jaloux, il eût aimé envelopper Reine d’une surveillance de tous les instants. S’il arrivait qu’elle fût à lui, il saurait la garder et la dominer. Il se ferait le maître de ses pensées mêmes. Mais à l’instant où il se penchait dans l’ouverture, sur le vallon décoloré qu’envahissaient des ombres livides, ses poignets tremblèrent. Près de la fontaine, une robe légère, entre les bouquets de feuillage, venait d’apparaître.

Elle avait cherché dans les prés, battu les chemins et était enfin venue s’abattre, brisée de fatigue, sur un banc de pierre. Régis l’avait aperçue. Elle semblait si solitaire, pleine d’attente, que son cœur s’émut. Il n’aurait pas voulu la revoir seule. Il eût aimé fuir. Mais on n’évite jamais rien et déjà il était près d’elle.

— Ah ! demanda-t-elle, où étiez-vous ?