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REINE D’ARBIEUX

Il s’était levé :

— Je vous laisse, dit-il. Dans l’état où vous êtes, il est inutile de discuter davantage. Moi, je ne m’emporte pas contre une femme. Je ne suis pas violent, je ne suis pas brutal.

Sa voix était rauque, un peu grinçante.

— Permettez-moi seulement de vous mettre en garde : quelles que soient vos illusions, votre fuite est certainement, à l’heure actuelle, une chose publique. N’espérez pas trouver d’indulgence. Tout le monde sera contre vous. La société ne pardonne que ce qui réussit. Si vous commettez l’erreur de revenir dans votre milieu, vous serez la dernière des dernières : une femme perdue ! Avec moi, dans un pays neuf, vous serez une femme qui a fait table rase de son passé… qui a osé se libérer, vivre sa vie. Ne croyez pas que je vous en veuille de vos injures. Tout à l’heure, quand vous m’insultiez, je vous admirais, je vous trouvais belle. Votre courage, c’est cela que j’aime ; ce mordant qui fait un contraste si vif avec votre grâce. Vous m’avez pris, vous me tenez jusque dans les moelles. Je ne peux plus me passer de vous. Maintenant, décidez…

— Ah ! répliqua-t-elle, hautaine, vous avez cru m’intimider. Le mépris des autres, cela m’est tellement égal !

Il savait qu’elle disait vrai et que s’il lui avait crié : « Germain vous tuera ! » elle aurait seulement répondu : « Tant pis ! » Lui qui n’avait connu que des amours de hasard, il admirait ces passes