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REINE D’ARBIEUX

bre des arbres, vers l’homme dont se démasquait le vrai visage. Elle se rappela soudain la voix haineuse d’Adrien, quand il lui avait parlé de Sourbets, et, comme une lumière qui serait montée au centre du drame, l’idée émergeait (avec quelle peine !) que cette rancune cruelle avait tout mené — idée qui éclairait les événements de ces derniers jours, lui révélant que la conduite inexplicable d’Adrien n’avait été ni un entraînement, ni une folie, et qu’autour d’elle s’était resserrée la trame de ruses où, prisonnière, elle se débattait.

« Je ne laisserai pas Germain m’accuser, pensait-elle, étouffant de douleur, mais retrouvant pour la lutte son vibrant courage. Je lui dirai la vérité… Il comprendra que c’est par désespoir que je suis partie ! »

Un ardent mépris bouleversait le cœur de la jeune femme. Ainsi, pour satisfaire sa vengeance, Adrien n’avait pas hésité à ruiner sa vie. « Un tartufe… vous ne savez donc pas que c’est un vil tartufe » lui avait, la veille au soir, crié son mari. Elle ne l’avait pas cru. Commençant à découvrir ce qu’est la vie véritable, avec le travail souterrain des intérêts et des convoitises, Reine regardait au dedans d’elle, frappée de stupeur, s’éclairer la personnalité dangereuse et trouble de l’homme qu’elle avait paré de tant d’illusions.

« Ah ! songeait Reine, il avait cru m’intimider… Quelle femme serais-je, si j’avais eu la pensée de faire tant de mal ! »