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REINE D’ARBIEUX

recevait l’hiver à Bazas dans le bel hôtel des comtes de la Brèche. Elle aimait la bonne compagnie. Comme c’est le destin de cette petite noblesse provinciale, engourdie dans des habitudes de bien-être et d’oisiveté, mais débordée par la vie moderne, et qui agonise depuis la guerre, elle portait sur toute sa personne la mélancolie des choses finissantes.

Son regret était que sa fille, Clémence, eût refusé de venir à cette réunion. Sa mère s’en plaignait. Maintenant que la jeune fille était guérie de la coxalgie qui l’avait immobilisée durant cinq années, à plat dans une gouttière, elle aurait pu vivre comme les autres.

— Veux-tu que je reste ? lui avait-elle demandé avant de partir.

À côté d’elle, Mme  Dutauzin, qui tenait toutes les médisances de la sous-préfecture en suspens sur ses lèvres minces, répandait à mi-voix ses insinuations. Était-il vrai que Régis Lavazan fût venu pour faire ses adieux ?

— Elisa sera plus tranquille !

Comme Mme  Fondespan s’était levée pour aller au-devant d’un nouveau venu, il sembla qu’une écluse venait d’être ouverte, libérant un flot de paroles :

— Ainsi, interrogeait Mme  de la Brèche, aux écoutes, et qui avait seulement saisi quelques mots, vous pensez que Reine…

Mme  Dutauzin protesta qu’elle ne pensait rien. Les jeunes gens étaient des amis d’enfance. Pou-