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REINE D’ARBIEUX

Germain allait tous les jours à la papeterie mais n’y restait souvent qu’un moment. Comme beaucoup de Landais, pour lesquels la chasse, les foires, les parties de cartes au café sont une grande partie de la vie, il lui fallait rouler sur les routes. À la sous-préfecture, où il avait l’habitude de boire un Byrrh avant le déjeuner, il n’était guère de jour où l’on ne vît son auto sur un côté de la place, devant les couverts qui alignent leurs arcades sur des piliers bas.

Mais, ce lundi matin, avant huit heures, sa voiture vira dans le chemin creux bordé d’acacias qui forme au-dessus de l’usine un tournant rapide. Les femmes qui hachaient dans un hangar la paille de seigle, à l’étage supérieur d’un long bâtiment en pierre percé d’ouvertures, lui jetèrent des regards curieux. L’auto roula sur la passerelle. Un chien aboya, d’une voix basse et précipitée qui se détacha sur le grondement de la chute.

La fabrique était établie au milieu des bois, au fond d’un étroit ravin. Le cours d’eau, le Ciron, se précipitant sous les arbres, avait déchaussé des racines noueuses et miné les rives embroussaillées d’un sauvage fouillis de verdure. Germain passa devant un hangar bourré de seigle jusqu’à la charpente ; devant un autre à moitié vide. Le moulin à papier, où l’on entendait ronfler les machines et tourner les meules, formait dans le fond un bâtiment d’angle posé sur le barrage.

Germain regarda à droite, à gauche, respira cette