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Le 9 juillet Ruge écrivit à Freiligrath.

« … Il est resté remarquablement jeune et a conservé toute sa bonne humeur… »[1]. Et il ajoute : « Bien entendu, Bakounine est tout adonné à la révolution russe ; cependant l’affaire se présente d’une façon incohérente. Un joli commencement ! Nous allons voir ce que sera la fin ! »

Quelques jours après, le 12 juillet, Ruge écrivit aussi à Freiligrath :

« Bien entendu, Bakounine est Russe jusqu’au bout des ongles ; et il n’est pas seulement Russe, mais bien encore Slave. Personne ne saurait le lui reprocher. Cependant, il n’est pas comme Golovine, qui estime les Russes invincibles en Valachie ; lui, au contraire, s’attendait à la prise de Sébastopol, il la désirait même, car il espérait qu’avec cette défaite, le système de Nicolas s’effondrerait. Naturellement, il se donne corps et âme à la révolution russe qu’il aperçoit à l’horizon, mais il ne ferme pas les yeux non plus sur le caractère barbare qu’elle devra revêtir et sur la collision probable avec l’Allemagne, parce que nous, Allemands, nous sommes les oppresseurs des Slaves.

« Mais tout cela lui apparaît, comme à moi-même, dans un avenir bien éloigné. « Dernièrement, — lisons-nous dans les télégrammes d’aujourd’hui, — il y a eu entente entre le tzar et Napoléon ». Si cette entente

  1. Autre part, Ruge raconte dans la « Neue Freie Presse », l’impression que lui fit Bakounine à son arrivée à Londres. Il trouva que même sa voix avait changé, de sorte qu’il ne put le reconnaître qu’à ses idées ; sa santé ayant été altérée par un si long emprisonnement.