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impliqués à l’affaire des troubles universitaires qui eurent lieu en Russie, vers cette époque.

Les étudiantes russes à elles seules étaient à Zurich, au nombre de 120. Le cercle de cette nouvelle catégorie de réfugiés entra en relations étroites avec Bakounine et constitua une large action propagandiste-littéraire, lui servant en même temps à recueillir quelques modestes sommes pour assurer son existence. Par les soins de ce cercle, furent édités en 1873, les volumes suivants de Bakounine : « Le développement historique de l’Internationale », « L’État et l’Anarchie », t. I, et en 1874 : « L’Anarchie d’après Proudhon », t. I, etc. À cette même époque, vint s’établir à Zurich M. Lavroff (colonel et ex-professeur à l’Académie d’artillerie de Pétersbourg, exilé en 1866 par ordre administratif dans le gouvernement de Vologda, d’où il s’était évadé). Un groupe de jeunes Russes, à Zurich, lui fit la proposition de diriger la revue « En Avant », qu’ils allaient fonder. Bientôt après, une scission manifeste se produisit au milieu de la jeunesse russe en Suisse, qui se divisa en deux groupes, les « lavristes » et les « bakounistes ». Cette séparation eut pour cause, non seulement la question de la gérance de la bibliothèque russe à Zurich (fondée par les réfugiés « bakounistes » qui entendaient la diriger seuls, à l’exclusion des nouveau-arrivés étudiants ayant en tête les « lavristes » et qui réclamèrent des droits égaux), mais surtout le programme même de la revue « En Avant », écrit par M. Lavroff qui, au point de vue d’un grand nombre de jeunes gens, était par trop modéré et n’accusait pas un caractère socialiste. Bien que dans la question de la bibliothèque la majorité se rangeât du côté des « lavristes », au contraire, dans l’ordre des choses politico-sociales, les idées de cette même majorité, se rapprochaient beaucoup plus de celles de Bakounine, de sorte que M. Lavroff se vit obligé de refaire deux ou trois fois son programme de l’ « En Avant », où il publia même un article sur la pougatchevstchtina (1773-1873), tout à fait dans l’esprit révolutionnaire de Bakounine.

Dans le temps, cette lutte pour les idées eut une place très marquée dans la vie des jeunes amis de Bakounine, sinon dans la sienne (lui-même n’habitait pas Zurich), mais elle laissa peu de traces dans sa correspondance que nous avons entre nos mains. Et c’est pourquoi nous publions ici la lettre de Sokoloff. Nous espérons que les personnes, mieux informées, nous