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Votre programme, mon vieux, laisse à désirer, mais il ne s’agit pas de cela ; il s’agit beaucoup plus de ce que vous faites pour la propagande et pour l’organisation.


Je vous embrasse tous les deux. M. B.



LETTRE DE BAKOUNINE À OGAREFF


14 novembre 1871. Locarno.


Mon cher vieil Aga,


Je ne t’ai pas écrit depuis bien longtemps, parce que ma situation est devenue tout à fait impossible et qu’elle empire de jour en jour, de sorte que je ne puis te dire rien de gai.

1° Ma femme a perdu son dernier frère ; elle-même et toute sa famille sont au désespoir. Elle a des inquiétudes pour la vie de sa mère, de son père, de ses sœurs. Je ne la quitte ni de jour, ni de nuit, afin de la tranquilliser quelque peu en la persuadant que tous les autres membres de la famille sont sains et saufs. Nous avons dépensé les derniers 25 francs qui nous restaient pour envoyer un télégramme à sa sœur, à Krasnoïarsk. Mais voilà dix jours d’écoulés déjà, sans que nous ayons obtenu de réponse quelconque. Peut-être le télégramme a été saisi par la police ou encore quelque nouveau malheur est-il arrivé. Je tremble à cette idée ;

2° À cet état de fièvre s’ajoute encore l’absence complète d’argent et, par dessus le marché, des dettes partout ; des réclamations du propriétaire de la maison, de l’épicier, du boucher. Ces deux derniers nous