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effervescence, passe toutes ses journées à conspirer avec les montagnards[1], n’aura, certes, pas le temps de s’occuper de mon ouvrage, malgré toute sa bonne volonté.

Cette fièvre allait m’atteindre moi-même, néanmoins, j’ai pu lui résister. Je ne vois que trop clairement que la cause est perdue. Il paraît que les Français, la classe ouvrière elle-même, ne sont pas très émotionnés de cet état de choses. Cependant, combien la leçon est terrible ! Mais cela ne suffit pas ! Il leur faut des calamités plus grandes, des secousses plus fortes. Tout fait prévoir que ni les unes, ni les autres, ne manqueront. Et c’est alors, peut-être, que s’éveillera le démon. Mais, tant qu’il sommeille, nous n’y avons rien à faire. Il serait, vraiment, malheureux d’avoir à payer les verres cassés ; ce serait même tout à fait inutile. Notre tâche, à nous, est de faire le travail préparatoire, nous organiser et nous étendre, afin de nous tenir tout prêts, quand le démon se sera réveillé.

Faire le sacrifice de nos maigres ressources et de nos hommes déjà peu nombreux, cet unique trésor que nous possédons, avant que l’heure ait sonné, eût été coupable et imbécile. C’est là mon opinion définitive. Je fais mon possible et je t’engage beaucoup d’en faire autant pour retenir notre ami ou nos amis O. et Ross, de même que nos amis les montagnards. Hier, j’ai écrit dans ce sens à Adhémar, dis à O., d’ailleurs, de lire lui-même cette lettre que j’écris autant pour lui que pour toi.

Je reviens donc sur mon livre.

La première livraison doit se composer de huit feuilles imprimées.

  1. Bakounine appelait ainsi la Fédération jurassienne, de La Chaux-de-Fonds (Trad.).