Page:Bakounine - Lettres à Herzen et Ogarev, trad. Stromberg, Perrin, 1896.djvu/265

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de ceux des honnêtes gens de la Russie pour lesquels cette question, semble-t-il, reste encore obscure. Et, toujours pour les mêmes raisons, je vais leur parler en mon nom seulement.

Si vous voulez bien me le permettre, j’examinerai cette question, très importante à mon point de vue, dans le prochain numéro de votre journal. Mais je dois vous prévenir, mes amis, qu’il y aura dans mon exposé une divergence d’opinions avec les vôtres. Cela ne pourrait vous empêcher, n’est-ce pas, de le publier avec les remarques et les annotations que vous jugerez nécessaire d’y ajouter.

Oui, en effet, j’ai pris part à l’expédition polonaise de la mer Baltique, qui a échoué et que je n’avais pas imaginée de moi-même, mais que j’avais complètement approuvée. Dans le prochain numéro de la Cloche j’expliquerai dans quel but et pourquoi j’y ai participé. Pour le moment, je finis ma lettre par cette confession :

Oui, je désirais vivement que cette dernière révolution polonaise eût un complet succès et j’étais prêt à contribuer à son triomphe, dans la mesure de mes forces ; en premier lieu, parce que cette révolution était une juste et sainte cause contre le gouvernement de Pétersbourg, bien que le programme des Polonais ne concordât pas avec nos désirs et malgré qu’elle ne se conformât pas à nos idées socialistes ; que, précisément pour cette raison, elle négligeât la cause du peuple, et nuisît à l’émancipation des Petits-Russiens et des Russes eux-mêmes. En deuxième lieu, parce que son succès aurait porté un préjudice considérable, non à la Russie, comme le pense M. Aksakoff, mais à l’Empire de toutes les Russies, attendu que tout ce qui porte préjudice à cet empire