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serai à vous pour vous prier de la faire publier à Genève. Je ferai tous mes efforts pour réunir la somme nécessaire à cette publication. Tu m’as bien fait rire, Herzen, et en même temps causé beaucoup de peine, en me rappelant qu’entre nous, dans nos polémiques, l’injure ne doit pas avoir lieu ; cela est bon pour les enfants. L’estime et la sympathie que j’ai pour vous occuperont toujours la première place dans mon cœur et ceci, tout naturellement, sans que j’aie à m’y astreindre le moins du monde. Quelque considérable que soit la diversité de nos moyens et de nos voies, le but est le même ; j’apprécierai toujours très hautement le droit de m’appeler votre allié et votre ami.

On a donc assassiné Mikhaïloff, et on fera de même de Tchernychevski. Il n’y a pas de doute, que Nicolas eût été préférable à votre veau enragé d’Alexandre. Lorsque Mouravieff-Amourski prit son poste dans la Sibérie orientale — c’était en 1848, lors de la réaction arrivée à son apogée — son premier acte fut de délivrer de leurs chaînes, des travaux forcés et de toutes les oppressions les déportés politiques russes et polonais. Et les dénonciations pleuvèrent aussitôt contre lui à Irkoutsk. Mais, après les avoir lues, Nicolas dit : « Enfin, ai-je trouvé l’homme qui m’ait compris. Là-bas il faut bien les traiter en humains. » J’ai connu personnellement le colonel Deichmann ; sous Nicolas et sous la direction de Mouravieff-Amourski, on le considérait plutôt comme l’oppresseur et non le défenseur des déportés. Sous Alexandre II, il est un héros et un martyr.

Quelles nouvelles avez-vous de Potanine et du complot que l’on vient de découvrir en Sibérie ? Non seulement j’ai connu cet homme personnellement, mais