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à notre cause, et je t’assure qu’il est le meilleur et le plus fort de nous et que l’avenir de la Russie repose sur lui. Éventuellement, il se décide à se retirer des affaires, malgré le portefeuille de ministre de l’intérieur que l’on veut lui offrir. Il a pris la ferme résolution de ne rien accepter avant que le système gouvernemental ne soit radicalement changé et son programme politique adopté. Celui-ci se résume en peu de mots :

1o L’affranchissement absolu des paysans en les dotant de la terre qu’ils cultivent ;

2o Les tribunaux publics avec jurés, auxquels tous les fonctionnaires du haut en bas de l’État seront soumis ;

3o L’enseignement populaire pratiqué sur une large échelle ;

4o Le self-government, l’abolition de la bureaucratie, et autant que possible, la décentralisation de l’empire Russe, sans constitution ni parlement. Il sera établi une dictature de fer en vue de l’émancipation des Slaves, laquelle doit commencer par la Pologne, recouvrant son intégrité, et par une lutte à mort avec l’Autriche et la Turquie.

Voilà tout le programme de l’homme énergique et sérieux qui a déjà donné des preuves suffisantes qu’il est à même de mettre ses projets à exécution. Je vous réponds de la sincérité de Mouravieff, car, je le considère comme l’un de mes meilleurs amis. Moi, qui suis votre ami intime, l’ami dévoué de votre Cloche[1], dont l’influence et l’intégrité en Russie, croyez-le bien, me sont aussi chers qu’à vous-même, — quels senti-

  1. Ces paroles s’adressent aussi à Ogareff, qui prenait une large part dans la direction de la Cloche. (Trad.)