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Élève, admirateur et adorateur de Bastiat, qu’il considère, lui, comme le plus grand révolutionnaire, et qui, au point de vue du socialisme, est le plus grand réactionnaire qui ait existé au monde, M. Coullery professe un culte fanatique pour cette société, pour cette divine liberté. C’est une belle passion que nous ne demanderions pas mieux que de partager avec lui, et pour laquelle nous le louerions beaucoup, si nous ne savions pas que cette liberté, dont il s’est fait exclusivement le chevalier, n’est en réalité rien que le privilège de quelques-uns et l’esclavage du grand nombre. C’est la liberté du Journal de Genève, c’est la liberté préconisée par tous les bourgeois, lorsqu’ils font surveiller le travail de leurs ouvriers par les gendarmes.

Ah ! nous aussi, nous la voulons, la liberté ! Mais nous la voulons tout entière, non seulement religieuse, ou civile, ou politique, ou économique, mais humaine, — large comme le monde. Nous la voulons délivrée de toutes les chaînes dont l’écrasent les institutions religieuses, politiques, juridiques et économiques actuelles. Nous voulons la pleine liberté de chacun se manifestant par le développement intégral de toutes ses facultés naturelles, et fondée sur la solidarité et sur l’égalité de tout le monde ! Malheureusement pour M. Coullery, cette liberté sera la mort de la sienne, aussi sûr que l’émancipation des travailleurs sera la mort pour tous les privilèges économiques et politiques des bourgeois.

On se demande souvent : Ces prêcheurs si ardents