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pagne, rouler carrosse, et coucher avec quelque belle marquise. Il y parvient à force d’efforts héroïques et d’aventures extraordinaires, tandis que tous les autres succombent. Voilà le héros : c’est l’individualiste pur.

Voyons la politique. Comment s’y exprime le principe ? Les masses, dit-on, ont besoin d’être menées, gouvernées ; elles sont incapables de se passer de gouvernement, comme aussi elles sont incapables de se gouverner par elles-mêmes. Qui les gouvernera ? Il n’y a plus de privilège de classe. Tout le monde a le droit de monter aux plus hautes positions et fonctions sociales. Mais pour y parvenir il faut être intelligent, habile ; il faut être fort et heureux ; il faut savoir et pouvoir l’emporter sur tous les rivaux. Voilà encore une course au clocher : ce seront les individus habiles et forts qui gouverneront, qui tondront les masses.

Considérons maintenant ce même principe dans la question économique, qui au fond est la principale, on pourrait dire l’unique question. Les économistes bourgeois nous disent qu’ils sont les partisans d’une liberté illimitée des individus et que la concurrence est la condition de cette liberté. Mais voyons quelle est cette liberté ? Et d’abord une première question : |13 Est-ce le travail séparé, isolé, qui a produit et qui continue de produire toutes ces richesses merveilleuses dont se glorifie notre siècle ? Nous savons bien que non. Le travail isolé des individus serait à peine capable de nourrir et de