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la consigne que donnent tous les directeurs de journaux. Je m’étais résigné à expliquer mon affaire au quidam qui se trouvait là, quand tout à coup une porte s’ouvrit, et du sanctuaire je vis sortir Delescluze en personne, tel un sénateur P. J. Ozerof[1], bilieux, hautain. Sans autre préambule, il se mit à déblatérer contre Bakounine. Je lui répondis, en coupant court, qu’il ne s’agissait pas du tout de son opinion, mais de l’insinuation contenue dans l’article de Hess (bien que, à mon avis, l’article ne vaille vraiment pas la peine qu’on s’en tracasse).

« — Pour moi, dit alors le « sénateur P. J. Ozerof », je n’ai pas l’intention de publier les élucubrations de Bakounine. Il fait un mal énorme, et nous allons lutter de toutes nos forces contre ses théories. Il se peut qu’elles soient bonnes chez vous, mais elles ne conviennent pas à l’Europe. Vous autres Russes, vous savez, je ne sais comment, concilier le communisme avec l’absolutisme.

« — Mais où donc avez-vous vu cela ? demandai-je.

« Naturellement, il n’a jamais rien vu, excepté Ledru-Rollin.

« À ce moment arrivèrent divers autres espoirs de la France, puis un personnage à figure rasée et hâve qui se précipita vers moi, Camille Bonnet. Dio Santo ! encore les mêmes phrases, encore les mêmes manières… À la fin des fins, Delescluze me dit qu’il n’avait jamais voulu insulter Bakounine personnellement, et que si Bakounine l’a cru, il insérera ma lettre. Je tire alors de ma poche la

  1. Nous ne savons pas quel est ce personnage auquel Herzen compare Delescluze.