Page:Bakounine - Œuvres t5.djvu/154

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

créé les bateaux à vapeur, les chemins de fer et les télégraphes ; les chemins de fer qui, utilisés par la stratégie militaire, décuplent la puissance défensive et offensive des États ; et les télégraphes, qui, en transformant chaque gouvernement en un Briarée à cent, à mille bras, lui donnant la possibilité d’être présent, d’agir et de saisir partout, créent les centralisations politiques les plus formidables qui aient jamais existé au monde.

Qui peut donc nier que tous les progrès de la science, sans aucune exception, n’aient tourné jusqu’ici qu’à l’augmentation de la richesse des classes privilégiées et de la puissance des États, au détriment du bien-être et de la liberté des masses populaires, du prolétariat ? Mais, objectera-t-on, est-ce que les masses populaires n’en profitent pas aussi ? Ne sont-elles pas beaucoup plus civilisées dans notre société qu’elles ne l’étaient dans les siècles passés ?

À ceci nous répondrons par une observation de Lassalle, le célèbre socialiste allemand. Pour juger des progrès des masses ouvrières, au point de vue de leur émancipation politique et sociale, il ne faut point comparer leur état intellectuel dans le siècle présent avec leur état intellectuel dans les siècles passés. Il faut considérer si, à partir d’une époque donnée, la différence qui existait alors entre elles et les classes privilégiées ayant été constatée, elles