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sonnelle ; il identifie naïvement sa chère personne avec les principes, il aime qu’on s’occupe de lui, au point que, quand le monde l’oublie ou l’ignore, M. Coullery s’imagine volontiers qu’on oublie les principes. Faut-il s’étonner qu’avec de telles dispositions il se soit senti à l’étroit dans le monde si prosaïque du radicalisme bourgeois, et qu’il se soit laissé convertir par la mômerie religieuse et politique ? Chacun ne cherche-t-il pas naturellement, et n’a-t-il pas le droit d’adopter, la sphère qui lui convient davantage ?

M. Coullery n’a eu qu’un seul tort, un tort qu’en définitive nous voulons plutôt attribuer à son esprit qu’à son cœur. Ne s’est-il pas imaginé qu’en reculant dans le camp de la réaction, il a fait un progrès ! Son défaut de jugement ne lui a sans doute pas permis de comprendre que si les socialistes combattent le radicalisme bourgeois, ce n’est certainement pas au point de vue du passé, mais bien à celui de l’avenir, et que, s’il fallait choisir entre le présent et le passé, aucun homme de cœur et de sens ne devrait hésiter : car enfin le radicalisme présent, avec toutes ses imperfections et contradictions, vaut toujours mille fois davantage que ce passé infâme que la Révolution a brisé et que des esprits équivoques, vaniteux et confus, voudraient faire revivre.

Si le socialisme proteste contre le radicalisme, ce n’est point du tout pour reculer, mais bien pour avancer. Ce qu’il lui reproche, ce n’est pas d’être ce