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a cessé de faire montre de son athéisme, et même de son indifférence pour les mensonges si utiles de la religion. Depuis 1830, c’est-à-dire depuis qu’elle se fut définitivement emparée de tous les pouvoirs de l’État, elle avait commencé déjà à comprendre que les promesses célestes de la religion pouvaient seules empêcher le prolétariat, dont le travail l’enrichit, de tirer les conséquences terrestres de la formule révolutionnaire : Liberté, Égalité |18 et Fraternité, dont elle s’était servie pour renverser le pouvoir de sa sœur aînée, la noblesse. Le socialisme, non le socialisme théorique élaboré par des penseurs généreux sortis de son sein, mais le socialisme pratique des masses ouvrières, issu de l’instinct et des souffrances même de ces masses, et qui fit sa première manifestation éclatante et sanglante à Lyon en 1831, et plus largement encore à Paris en 1848, acheva d’ouvrir les yeux aux bourgeois. Et lorsque, dans ces dernières années, le prolétariat non de la France seulement, mais de l’Europe et de l’Amérique, organisé en une immense Association internationale, eut arboré audacieusement le drapeau de l’athéisme, c’est-à-dire de la révolte contre toute exploitation et contre toute autorité divines et humaines, alors les bourgeois comprirent qu’il n’y avait plus pour eux de salut que dans le maintien quand même de la religion. Esprits forts, libertins, voltairiens et athées, après un siècle de lutte héroïque contre les absurdités de la foi et contre la dépravation religieuse, ils commencent à dire main-