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avant tout, ils tournaient aussi bien cette prévention, cette défiance contre eux-mêmes que contre toutes les autres personnes.

Contrairement à cette pensée des communistes autoritaires, selon moi tout à fait erronée, qu’une Révolution sociale peut être décrétée et organisée soit par une dictature, soit par une assemblée constituante issue d’une révolution politique, nos amis les socialistes de Paris ont pensé qu’elle ne pouvait être faite et amenée à son plein développement que par l’action spontanée et continue des masses, des groupes et des associations populaires.

Nos amis de Paris ont eu mille fois raison. Car, en effet, quelle est la tête si géniale qu’elle soit, ou, si l’on veut parler d’une dictature collective, fût-elle même formée par plusieurs centaines d’individus doués de facultés supérieures, quels sont les cerveaux assez puissants, assez vastes pour embrasser l’infinie multiplicité et diversité des intérêts réels, des aspirations, des volontés, des besoins dont la somme constitue la volonté collective d’un peuple, et pour inventer une organisation sociale capable de satisfaire tout le monde ? Cette organisation ne sera jamais qu’un lit de Procuste sur lequel la violence plus ou moins marquée de l’État forcera la malheureuse société à s’étendre. C’est ce qui est toujours arrivé jusqu’ici, et c’est précisément à ce système antique de l’organisation par la force que la Révolution sociale doit mettre un terme en rendant leur pleine liberté aux masses, aux groupes, aux com-