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serons comme des frères, et nous crierons avec eux : Vive la République démocratique et sociale ! Sinon, non. Nous ne voulons ni de l’infâme Bonaparte, ni de Henry V, ni des princes d’Orléans, ni d’aucun autre roi, mais nous ne voulons pas non plus de la république bourgeoise, et nous ne déposerons nos armes que lorsque nous aurons conquis pour tous l’égalité et la liberté. »

Entre ces deux négations, l’une aussi énergique que l’autre, que restait-il à faire à l’honorable député de Marseille ? Des phrases, rien que des phrases. L’infortuné ! Il a voulu asseoir sa nouvelle république sur un nouveau baiser Lamourette, plus impossible encore que le premier ! Il a cru qu’il parviendrait à combler par ses paroles éloquentes un abîme ! Il a espéré qu’il lui suffirait de présenter aux deux parties, si profondément séparées par l’opposition absolue de leurs intérêts, son idéal politique, pris en dehors de la réalité vivante de nos jours, pour que, les uns oubliant leur richesse et leur insolence, les autres leur misère et leur esclavage, ils restent confondus dans une étreinte fraternelle, sous la baguette magique du jeune républicain, qui « commanderait fraternellement » aux uns et aux autres.

M. Gambetta est pourtant un homme d’esprit. Est-il possible qu’il ait poussé la naïveté |108 jusqu’à se laisser entraîner par une pareille illusion, par un rêve que de nos jours on pardonnerait à peine à un collégien ?