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Demandez aux ouvriers de l’Amérique du Nord s’ils le sont ? Huit cent mille[1] ouvriers fédérés en une association puissante, et qui fait partie de la grande Association internationale des travailleurs depuis plus d’un an, vous diront que cette liberté et tous les droits politiques ne sont réels que pour les riches, mais que les travailleurs, vivant de leur salaire, sont aussi bien esclaves en Amérique qu’en Europe.

Vous voyez bien que l’abîme qui sépare les travailleurs de la bourgeoisie reste béant partout, et c’est en vain, je vous le répète encore, Monsieur Gambetta, que vous, l’avocat de la bourgeoisie, et tous vos amis démocrates et socialistes bourgeois, grands partisans de cette Ligue bourgeoise de la Paix et de la Liberté, dont l’impuissance et la fastidieuse rhétorique règnent aujourd’hui sans partage et dans le gouvernement de la Défense nationale, et dans tout ce monde officiel que vous venez de créer pour diriger les destinées de la France, et — vous dirai-je le mot ? — pour la perdre et pour la livrer, sans doute bien malgré vous, aux Prussiens ; c’est en vain que vous vous êtes efforcés tous de prêcher aux tra-

  1. Ils étaient au nombre de huit cent mille l’an passé, et ils ont bien certainement dépassé le chiffre d’un million aujourd’hui. (Note de Bakounine.) — Lorsque au Congrès général de l’Internationale à Bâle, en 1869, le président, Jung, dans la séance du 10 septembre au matin, présenta le délégué américain Cameron, envoyé par la National Labor Union des États-Unis, il annonça que ce délégué « représentait huit cent mille frères d’au-delà l’Atlantique ». (Compte rendu du Congrès de Bâle, p. 81.) — J. G.