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outrance, la guerre barbare au couteau, s’il le faut. N’ayant aucun bien matériel à sacrifier, ils donnent leur vie. Ils comprennent d’ailleurs instinctivement que l’asservissement de la France sous le joug des Prussiens serait la mort pour toutes leurs espérances d’avenir, et ils sont déterminés à mourir plutôt que de laisser à leurs enfants un avenir d’esclavage et de misère.

La bourgeoisie, au moins l’immense majorité de cette classe respectable, veut absolument le contraire. Elle veut avant tout la conservation de ses maisons, de ses villes, de ses propriétés, de ses capitaux, elle veut l’intégrité non du territoire national, mais de ses poches remplies par le travail du prolétariat. Dans son for intérieur, sans oser l’avouer en public, elle veut donc la paix à tout prix, dût-on même l’acheter par l’anéantissement, par la déchéance et par l’asservissement de la France.

Les buts que poursuivent la classe bourgeoise et la masse ouvrière étant si complètement opposés, comment une union sincère et réelle pourrait-elle |8 s’établir entre elles ? On aura beau condamner la division, elle n’en existe pas moins dans le fait, et, puisqu’elle existe, il serait puéril et même funeste, au point de vue du salut de la France, d’en ignorer, d’en nier, de ne point en constater l’existence. Quand on va à l’encontre d’un immense danger, ne vaut-il pas mieux marcher en petit nombre, avec la parfaite certitude de ne point être abandonné, au moment de la lutte, par aucun de ses compagnons,