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males |177 entre elles et avec les différentes espèces végétales ? Tout cela constitue, pour chaque animal, un ensemble de conditions d’existence, un caractère, une nature, et je serais presque tenté de dire un culte particulier ; car chez les animaux, dans tous les êtres vivants, vous retrouverez une sorte d’adoration de la nature, mêlée de crainte et de joie, d’espérance et d’inquiétude, — la joie de vivre et la crainte de cesser de vivre, — et qui, en tant que sentiment, ressemble beaucoup à la religion humaine. L’invocation et la prière même n’y manquent pas. Considérez le chien apprivoisé, implorant une caresse, un regard de son maître : n’est-ce pas là l’image de l’homme à genoux devant son Dieu ? Ce chien ne transporte-t-il pas par son imagination et par un commencement de réflexion, que l’expérience a développée en lui, la toute-puissance naturelle qui l’obsède, sur son maître, de morne que l’homme croyant la transporte sur son Dieu ? Quelle est donc la différence entre le sentiment religieux du chien et celui de l’homme ? Ce n’est pas même la réflexion, c’est le degré de réflexion, ou même, plutôt, c’est la capacité de la fixer et de la concevoir comme une pensée abstraite, de la généraliser en la nommant ; la parole humaine ayant ceci de particulier, qu’incapable de nommer les choses réelles, celles qui agissent immédiatement sur nos sens, elle n’en exprime que la notion ou la généralité abstraite ; et comme la parole et la pensée sont les deux formes distinctes, mais inséparables, d’un seul et même acte de l’humaine réflexion, cette der-