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il ne conquiert la possibilité de son émancipation intérieure, qu’autant qu’il est parvenu à rompre les chaînes d’esclave que la nature extérieure fait peser sur tous les êtres vivants. Ces chaînes, en commençant par les plus grossières et les plus apparentes, sont les privations de toute espèce, l’action incessante des saisons et des climats, la faim, le froid, le chaud, l’humidité, la sécheresse et tant d’autres influences matérielles qui agissent directement sur la vie animale et qui maintiennent l’être vivant dans une |155 dépendance quasi-absolue vis-à-vis du monde extérieur ; les dangers permanents qui, sous la forme de phénomènes naturels de toute sorte, le menacent et l’oppressent de tous les côtés, d’autant plus qu’étant lui-même un être naturel et rien qu’un produit de cette même nature qui l’étreint, l’enveloppe, le pénètre, il porte pour ainsi dire l’ennemi en lui-même et n’a aucun moyen de lui échapper. De là naît cette crainte perpétuelle qu’il ressent et qui constitue le fond de toute existence animale, crainte qui, comme je le montrerai plus tard, constitue la base première de toute religion. De là résulte aussi pour l’animal la nécessité de lutter pendant toute sa vie contre les dangers qui le menacent du dehors ; de soutenir son existence propre, comme individu, et son existence sociale, comme espèce, au détriment de tout ce qui l’entoure : choses, êtres organiques et vivants. De là pour les animaux de toute espèce la nécessité du travail.

Toute l’animalité travaille et ne vit qu’en travail-