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diques, imposées par des hommes à des hommes, soit par le droit de la force, violemment ; soit hypocritement, au nom d’une religion ou d’une doctrine métaphysique quelconque ; soit enfin en vertu de cette fiction, de ce mensonge démocratique, qu’on appelle le suffrage universel.

|104 Contre les lois de la nature, pour l’homme, il n’est point de révolte possible ; par cette simple raison, qu’il n’est lui-même qu’un produit de cette nature et qu’il n’existe qu’en vertu de ces lois. Se révolter contre elle serait donc de sa part une tentative ridicule, une révolte contre soi-même, un vrai suicide. Et lors même que l’homme prend la détermination de se détruire, lors même qu’il exécute ce projet, il agit encore conformément à ces lois naturelles auxquelles rien, ni la pensée, ni la volonté, ni le désespoir, ni aucune autre passion, ni la vie ni la mort ne sauraient le soustraire. Lui-même n’est rien que nature ; ses sentiments les plus sublimes ou les plus monstrueux, les déterminations les plus dénaturées, les plus égoïstes ou les plus héroïques de sa volonté, ses pensées les plus abstraites, les plus théologiques, les plus folles, tout cela n’est rien que nature. La nature l’enveloppe, le pénètre, constitue toute son existence : comment pourra-t-il jamais sortir de la nature ?

On peut s’étonner qu’il ait jamais pu concevoir l’idée d’en sortir. La séparation étant si complètement impossible, comment l’homme a-t-il pu seulement la rêver ? D’où vient-il, ce rêve monstrueux ?