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nité, considérée comme un tout, et dont les individus historiques qui ont contribué soit à sa fondation, soit à son développement, n’ont été que les interprètes divinement inspirés. Il considère l’État comme la forme inévitable, permanente, unique, absolue, de l’existence collective des hommes, c’est-à-dire de la société ; comme la condition suprême de toute civilisation, de tout progrès humain, de la justice, de la liberté, de la commune prospérité ; en un mot, comme la seule réalisation possible de l’humanité. (Et pourtant, il est évident, comme je le démontrerai plus tard, que l’État est la négation flagrante de l’humanité.)

Représentant de la raison publique, du bien public, et du droit de tout le monde, organe suprême du développement collectif, tant matériel qu’intellectuel et moral, de la société, l’État doit être armé, vis-à-vis de tous les individus, d’une grande autorité et d’une formidable puissance. Mais il résulte du principe même de l’État que cette autorité, cette puissance ne sauraient, sans détruire son objet et sa base, tendre à la destruction |274 du droit naturel des hommes. Si l’État modifie et limite en partie la liberté naturelle de chaque individu, ce n’est que pour la renforcer davantage par la garantie de cette puissance collective dont il est le seul représentant légitime, ce n’est que pour la consacrer, pour la civiliser et pour la convertir, en un mot, en liberté juridique ; la liberté naturelle étant la liberté des sauvages, et la liberté juridique étant seule digne