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chrétien quatre classes qui correspondent aux castes de l’antiquité, mais qui nous apparaissent toutefois modifiées par l’esprit nouveau : la classe des prêtres, non héréditaire cette fois, mais se recrutant indifféremment dans toutes les classes ; la classe héréditaire des seigneurs féodaux, les guerriers ; celle de la bourgeoisie des villes, correspondant au peuple libre de l’antiquité ; et enfin la classe des serfs, les paysans taillables et corvéables à merci, remplaçant les esclaves, avec cette différence énorme qu’on ne les considère plus comme des choses, mais comme des êtres humains doués d’une âme immortelle, ce qui n’empêche pas les seigneurs de les traiter comme s’ils n’avaient |261 pas du tout d’âme.

En outre, nous trouvons dans la société chrétienne un fait nouveau : la séparation désormais inévitable de l’Église et de l’État. Cette séparation fut la conséquence naturelle du principe international, universellement humain (inhumain, mais divin), du christianisme. Tant que les cultes et les dieux étaient exclusivement nationaux, ils pouvaient, ils devaient même se fondre avec les États nationaux. Mais du moment que l’Église avait pris ce caractère d’universalité, la réalisation de l’État universel étant matériellement impossible (et pourtant il ne devrait y avoir rien d’impossible pour Dieu ! ), il a bien fallu que l’Église souffrît en dehors d’elle l’existence et l’organisation d’États nationaux, soumis naturellement à sa direction suprême et n’ayant droit d’exister |262 qu’autant qu’elle les avait sanctionnés,