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Peut-on s’étonner, après cela, que cette croyance se soit maintenue jusqu’à nos jours, et qu’elle continue d’exercer son influence désastreuse même sur des esprits d’élite comme Mazzini, Quinet, Michelet et tant d’autres ? Nous avons vu que la première attaque fut soulevée contre elle par la Renaissance du libre esprit au quinzième siècle, Renaissance qui produisit des héros et des martyrs comme Vanini, comme Giordano Bruno et comme Galilée, et qui, bien qu’étouffée bientôt par le bruit, le tumulte et les passions de la Réforme religieuse, continua sans bruit son travail invisible, léguant aux plus |233 nobles esprits de chaque génération nouvelle cette œuvre de l’émancipation humaine par la destruction de l’absurde, jusqu’à ce qu’enfin, dans la seconde moitié du dix-huitième siècle, elle reparut de nouveau au grand jour, élevant hardiment le drapeau de l’athéisme et du matérialisme.

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On put croire alors que l’esprit humain allait enfin se délivrer, une fois pour toutes, de toutes les obsessions divines. C’était une erreur. Le mensonge divin, dont l’humanité s’était nourrie — pour ne parler que du monde chrétien — pendant dix-huit siècles, devait se montrer, encore une fois, plus puissant que l’humaine vérité. Ne pouvant plus se servir de la gent noire, des corbeaux consacrés de l’Église, des prêtres catholiques ou protestants, qui avaient perdu