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L’homme, comme tout le reste du monde, est un être complètement matériel. L’esprit, la faculté de penser, de recevoir et de réfléchir les différentes sensations tant extérieures qu’intérieures, de s’en ressouvenir alors qu’elles sont passées et de les reproduire par l’imagination, de les comparer et de les distinguer, d’en abstraire les déterminations communes et de créer par là même des notions générales ou abstraites, enfin de former les idées en groupant et en combinant les notions selon des modes différents, — l’intelligence en un mot, l’unique créateur de tout notre monde idéal, est une propriété du corps animal et notamment de l’organisation tout à fait matérielle du cerveau.

Nous le savons d’une manière très certaine, par l’expérience universelle, qu’aucun fait n’a jamais démentie et que tout homme peut vérifier à chaque instant de sa vie. Dans tous les animaux, sans excepter les espèces les plus inférieures, nous trouvons un certain degré d’intelligence, et nous voyons que, dans la série des espèces, l’intelligence animale se développe d’autant plus, que l’organisation d’une espèce se rapproche davantage de celle de l’homme ; mais que dans l’homme seul, elle arrive à cette puissance d’abstraction qui constitue proprement la pensée.

L’expérience universelle[1] qui, en définitive, est

  1. Il faut bien distinguer l’expérience universelle, sur laquelle se fonde toute la science, de la foi universelle, sur laquelle les idéalistes veulent appuyer leurs croyances ; la première est une constatation réelle de faits réels ; la seconde n’est qu’une supposition de faits que personne n’a vus et qui par conséquent sont en contradiction avec l’expérience de tout le monde. (Note de Bakounine.)