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la société. Les savants, toujours présomptueux, toujours suffisants, et toujours impuissants, voudraient se mêler de tout, et toutes les sources de la vie se dessécheraient sous leur souffle abstrait et savant.

Encore une fois, la vie, non la science, crée la vie ; l’action spontanée du peuple lui-même peut seule créer la liberté populaire. Sans doute, il serait fort heureux que la science pût, dès aujourd’hui, éclairer la marche spontanée du peuple vers son émancipation. Mais mieux vaut l’absence de lumière qu’une fausse lumière allumée parcimonieusement du dehors avec le but évident d’égarer le peuple. D’ailleurs le peuple ne manquera pas absolument de lumière. Ce n’est pas en vain qu’un peuple a parcouru une longue carrière historique et qu’il a payé ses erreurs par des siècles de souffrances horribles. Le résumé pratique de ces douloureuses expériences constitue une sorte de science traditionnelle, qui, sous certains rapports, vaut bien la science théorique. Enfin une partie de la jeunesse studieuse, ceux d’entre les bourgeois studieux qui se sentiront assez de haine contre le mensonge, contre l’hypocrisie, contre l’iniquité |224 et contre la lâcheté de la bourgeoisie, pour trouver en eux-mêmes le courage de lui tourner le dos, et assez de passion pour embrasser sans réserve la cause juste et humaine du prolétariat, ceux-là seront, comme je l’ai déjà dit, les instructeurs fraternels du peuple ; en lui apportant les connaissances qui lui manquent encore, ils ren-