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ner les masses à une animalité sans issue. Le matérialisme nie le libre arbitre, et il aboutit à la constitution de la liberté ; l’idéalisme, au nom de la dignité humaine, proclame le libre arbitre, et, sur les ruines de toute liberté, il fonde l’autorité. Le matérialisme repousse le principe d’autorité, parce qu’il le considère, avec beaucoup de raison, comme le corollaire de l’animalité, et qu’au contraire le triomphe de l’humanité, qui est selon lui le but et le sens principal de l’histoire, n’est réalisable que par la liberté. En un mot, dans quelque question que ce soit, vous trouverez les idéalistes toujours en flagrant délit de matérialisme pratique ; tandis qu’au contraire vous verrez les matérialistes poursuivre et réaliser les aspirations, les pensées les plus largement idéales.

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L’histoire, dans le système des idéalistes, ai-je dit, ne peut être qu’une chute continue. Ils commencent par une chute terrible, et dont ils ne se relèvent jamais : par le salto mortale divin des régions sublimes de l’Idée pure, absolue, dans la matière. Et observez encore dans quelle matière : non dans cette matière éternellement active et mobile, pleine de propriétés et de forces, de vie et d’intelligence, telle qu’elle se présente à nous dans le monde réel ; mais dans la matière abstraite, appauvrie et réduite à la misère absolue par le pillage en règle de ces Prus-