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sait ce qu’on appelle une affaire sûre : il gagnait les bonnes grâces et méritait la reconnaissance toujours si utile d’une grande monarchie voisine, sachant bien que l’opinion publique et le sentiment démocratique de la Suisse étaient si profondément endormis ou tellement absorbés dans les petites affaires, dans les petits gains de chaque jour, qu’ils ne s’apercevraient même pas du soufflet qu’ils recevaient en pleine joue. Hélas ! le Conseil fédéral s’est montré un profond connaisseur de nos dispositions et de nos mœurs actuelles. À part quelques rares protestations, les républicains de la Suisse sont restés impassibles devant un tel acte accompli en leur nom.

Cette impassibilité du sentiment public fut un encouragement pour le Conseil fédéral, qui, désireux de plaire toujours davantage aux puissances despotiques, ne demandait pas mieux que de persévérer dans la même voie. Il ne le prouva que trop bien dans l’affaire de la princesse Obolensky.


Une mère de famille qui a le malheur d’être née dans l’aristocratie russe, et le malheur encore plus grand d’avoir été donnée en mariage à un prince russe, cagot à genoux devant tous les popes orthodoxes de Moscou et |6 de Saint-Pétersbourg et naturellement prosterné devant son empereur, enfin tout ce qu’il y a de plus servile dans ce monde de la servilité officielle ; — cette mère veut élever ses enfants dans la liberté, dans le respect du travail et de l’humanité. Pour cela, elle s’établit en Suisse, à Vevey.