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D’ailleurs, dans Luther lui-même, il y avait une contradiction évidente. Comme théologien, il était et devait être réactionnaire ; mais comme nature, comme |115 tempérament, comme instinct, il était passionnément révolutionnaire. Il avait la nature de l’homme du peuple, et cette nature puissante n’était point faite pour subir |133 patiemment le joug de qui que ce soit. Il ne voulait plier que devant Dieu, dans lequel il avait une foi aveugle et dont il croyait sentir la présence et la grâce en son cœur ; et c’est au nom de Dieu que le doux Mélanchthon, le savant théologien, et rien qu’un théologien, son ami, son disciple, en réalité son maître et le museleur de cette nature léonine, parvint à l’enchaîner définitivement à la réaction.

Les premiers rugissements de ce rude et grand Allemand furent tout à fait révolutionnaires. On ne peut s’imaginer, en effet, rien de plus révolutionnaire que ses manifestes contre Rome ; que les invectives et les menaces qu’il lança à la face des princes de l’Allemagne ; que sa polémique passionnée contre l’hypocrite et luxurieux despote et réformateur de l’Angleterre, Henry VIII. À partir de 1517 jusqu’à 1525, on n’entendit plus en Allemagne que les éclats de tonnerre de cette voix qui semblait appeler le peuple allemand à une rénovation générale, à la révolution.

Son appel fut entendu. Les paysans de l’Allemagne se levèrent avec ce cri formidable, le cri socialiste : Guerre aux châteaux, paix aux chau-