Page:Bakounine - Œuvres t2.djvu/467

Cette page a été validée par deux contributeurs.

le sont tous les actes d’un despotisme quelconque, russe ou prussien. Mais elles ne surpassent pas celles que le gouvernement prussien commet chaque jour dans ses provinces prusso-polonaises, et pourtant ce même public allemand se garde bien de protester contre le despotisme prussien. De tout cela il résulte que pour les Allemands il ne s’agit pas du tout de justice, mais d’acquisition, de conquête. |77 Ils convoitent ces provinces, qui leur seraient effectivement très utiles au point de vue de leur puissance maritime dans la Baltique, et je ne doute pas que Bismarck ne nourrisse, dans quelque compartiment très reculé de son cerveau, l’intention de s’en emparer, tôt ou tard, d’une manière ou d’une autre. Tel est le point noir qui surgit entre la Russie et la Prusse.

Tout noir qu’il est, il n’est pas encore capable de les séparer. Elles ont trop besoin l’une de l’autre. La Prusse, qui désormais ne pourra plus avoir d’autre allié en Europe que la Russie, car tous les autres États, sans excepter même l’Angleterre, se sentant aujourd’hui menacés par son ambition, qui bientôt ne connaîtra plus de limites, se tournent ou se tourneront tôt ou tard contre elle, — la Prusse se gardera donc bien de poser maintenant une question qui nécessairement devrait la brouiller avec son unique amie, la Russie. Elle aura besoin de son aide, de sa neutralité au moins, aussi longtemps qu’elle n’aura pas anéanti complètement, au |90 moins pour vingt ans, la puissance de la France, détruit l’empire d’Autriche et englobé la Suisse allemande, une partie de la Bel-