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condamné, sans jugement, à dix années de travaux forcés sur la terre étrangère, et cela, en vertu d’une loi rétroactive, d’une loi conçue, votée et promulguée sous l’inspiration de la haine et de la peur (par des républicains bourgeois) ; celui-là, dis-je, n’a pas voulu quitter le sol de la mère-patrie, sans connaître les motifs sur lesquels un ministre audacieux a osé échafauder la plus terrible des proscriptions.

« En conséquence, il s’est adressé au commandant du ponton la Guerrière, lequel lui a donné communication de ce qui suit, textuellement extrait des notes jointes à son dossier :

« Lagarde, délégué du Luxembourg, homme d’une probité incontestable, homme très paisible, instruit, généralement aimé, et, par cela même, très dangereux pour la propagande. »

« Je ne livre que ce fait à l’appréciation de mes concitoyens, convaincu que leur conscience saura bien juger qui, des bourreaux ou de la victime, mérite le plus leur compassion.

|67 « Quant à vous, frères, permettez-moi de vous dire : Je pars, mais je ne suis pas vaincu, sachez-le bien ! Je pars, mais je ne vous dis pas adieu.

« Non, frères, je ne vous dis pas adieu. Je crois au bon sens du peuple ; j’ai foi dans la sainteté de la cause à la |57 quelle j’ai voué toutes mes facultés intellectuelles ; j’ai foi en la République, parce qu’elle est impérissable comme le monde. C’est pourquoi je vous dis au revoir, et surtout union et clémence !

« Vive la République !

« En rade de Brest, ponton la Guerrière.

« LAGARDE,

Ex-président des délégués du Luxembourg. »