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[1]  Je sais que cette idée et cette juste prévision choqueront la plupart des Français, ouvriers et bourgeois, même en ce moment terrible, même au milieu de l’actuelle catastrophe, qui vient de dévoiler d’une manière aussi cruelle qu’inattendue la faiblesse et la décadence de la nation française comme État : « Comment, nous devenir une vice-royauté des Prussiens — nous, subir le joug des Prussiens ! Nous souffrir qu’ils viennent commander en maîtres chez nous ! Mais c’est ridicule ! c’est impossible ! » Voici ce que me répondront, à très peu d’exceptions |76 près, tous les Français. Et moi je leur dirai : Non, ce n’est pas impossible, c’est au contraire si certain que si vous ne vous soulevez pas aujourd’hui en masse, pour détruire jusqu’au dernier des soldats allemands qui ont envahi le territoire de la France, demain ce sera la réalité. Plusieurs siècles de prédominance nationale ont tellement habitué les Française se considérer comme le premier, comme le plus puissant peuple du monde, que les plus intelligents ne voient pas, ce qui crève les yeux à tout le monde : que la France comme État est perdue, et qu’elle ne peut ressaisir, non pas sa grandeur nationale passée, mais une nouvelle grandeur, cette fois internationale, que par un soulèvement en masse du peuple français, c’est-à-dire par une révolution sociale.

Vous dites que c’est impossible, et sur quoi comptez-vous donc, vous tous, hommes d’État manqués et politiciens infortunés de la France, sur quoi comptez-vous pour vous défendre contre l’invasion formidable et si bien dirigée des armées allemandes, contre ces armées

  1. Une partie de cet alinéa est entrée presque textuellement dans la rédaction d’une partie des pages 42 et 43 de la brochure (de la p. 133, l. 17, à la p. 134, l. 24, de cette réimpression). — J. G.