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humains, peu propres au développement et à la propagande des idées. La guerre civile au contraire, en divisant cette masse en partis différents, crée les idées, en créant des intérêts et des aspirations différentes. L’âme, les instincts humains ne manquent pas à vos campagnes, ce qui leur manque c’est l’esprit. Eh bien, la guerre civile leur donnera cet esprit.

La guerre civile ouvrira largement les campagnes à votre propagande socialiste et révolutionnaire. Vous aurez, je le répète encore, vous aurez, ce que vous n’avez pas encore, dans les campagnes un parti, et vous pourrez y organiser largement le vrai socialisme, la collectivité inspirée, animée par la plus |62 complète liberté, vous l’organiserez de bas en haut, par l’action spontanée, mais en même temps nécessitée par [la] force des choses, des paysans eux-mêmes. Vous ferez alors du vrai socialisme révolutionnaire.

Ne craignez pas que la guerre civile, l’anarchie, aboutisse à la destruction des campagnes. Il y a dans toute société humaine un grand fond d’instinct conservateur, une force d’inertie collective, qui la sauvegarde contre tout danger d’anéantissement, et qui rend précisément l’action révolutionnaire, le progrès, si lents et si difficiles. La société européenne, aujourd’hui, dans les villes comme dans les campagnes, mais dans les campagnes encore plus que dans les villes, s’est complètement endormie, a perdu toute énergie, toute vigueur, toute spontanéité de pensée et d’action, sous l’égide de l’État. Encore quelques dizaines d’années passées dans cet état, et ce sommeil peut-être serait devenu la mort. Mais voici que, grâce aux Prussiens, l’État français s’en va au diable, il croule. Aucune force ne peut plus le sauver lui-même, d’autant moins il peut vous sauver, si