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et qui s’organiseront d’eux-mêmes, de bas en haut, pour la défense, et pour leur existence.

    législatif, a été rejetée par 184 contre 64 voix. Pendant cette discussion il s’est produit des mots et des révélations fort intéressantes.
    « JULES FERRY (l’auteur de la proposition). — Le rapport condamne les lois, et il en recommande le maintien provisoire, aujourd’hui que leur suspension est précisément nécessaire et évidente pour tout le monde. Le pays a besoin d’armes pour se défendre, ce besoin est extrême. Que fallait-il faire ? Abolir la prohibition, comme pour les céréales en temps de disette… Non seulement on n’arme pas, mais il y a des préfets qui refusent |24 les armes qu’on leur envoie. J’en connais un qui a répondu : « Pas de fusils, pas de volontaires. J’ai envoyé tous les hommes valides hors du département. » S’il y a des raisons politiques pour ne point armer le peuple, qu’on le dise. Si on craint que les armes ne tombent entre les mains des ennemis du gouvernement, il faut le dire. Il faut qu’on sache, que si quelque chose paralyse la défense nationale, c’est l’intérêt dynastique.
    « PICARD. — L’histoire ne comprendra pas cette discussion. Nous vous demandons la suspension d’une loi qui fait un délit de la détention d’armes et de munitions de guerre, et vous nous la refusez au moment où l’ennemi approche.
    « LE MINISTRE (président du Conseil d’État). — Vous voulez probablement organiser les forces du pays. Nous aussi. Mais nous voulons mettre les armes dont nous disposons — et elles sont nombreuses — entre les mains les plus capables de les bien employer. Nous voulons |25 la concentration et vous l’éparpillement des forces
    « PICARD. — Armez la garde mobile, soit. Armez la garde nationale, soit. Mais avez-vous vu un pays, un pays envahi par l’ennemi, dans lequel on dit aux citoyens : « Vous n’aurez pas le droit d’acheter une arme ; si l’armurier vous la vend, c’est qu’il aura violé la loi » ?
    « J. FAVRE. — On veut pouvoir nous condamner, même à présent, si nous prenons des armes pour nous défendre. Quant à moi, je vous déclare, que si vous maintenez cette loi, je la violerai.
    « LE MINISTRE. — Il me semble que la question ne comportait pas une telle animation.
    « J. FAVRE. — Voulez-vous que nous restions froids jusqu’à ce que les Prussiens soient à Paris ?
    « La proposition de M. Jules Ferry est rejetée à la majorité