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pas en eux de passion révolutionnaire suffisante ni de résolution pour tenter le saut périlleux. Ils restèrent de l’autre côté de l’abîme et pour séduire, pour entraîner les ouvriers, ils leur firent des mensonges, des phrases, des grimaces. Quand ils se trouvaient au milieu du prolétariat, ils se sentaient mal à leur aise, comme des gens d’ailleurs honnêtes mais qui se trouvent dans la nécessité de tromper. Ils se battirent les flancs pour trouver en eux-mêmes un mot vivant, une pensée féconde, ils n’en trouvèrent pas une seule. — Dans cette fantasmagorie révolutionnaire de 1848, il ne se trouva que deux hommes réels : Proudhon et Blanqui, tout à fait dissemblants d’ailleurs l’un à l’autre. Quant à tout le reste, ce ne furent que de mauvais comédiens qui jouèrent la révolution, comme les comédiens du moyen âge ont joué la passion — jusqu’à ce que Napoléon III n’eut (sic) tiré le rideau.

Les instructions que les commissaires extraordinaires de 1848 reçurent de Ledru-Rollin furent aussi incohérentes et vagues que le sont les pensées révolutionnaires de ce grand citoyen. C’étaient tous les gros (sic) mots de la révolution de 1793, sans aucune des grandes choses, ni des grands buts, ni surtout des énergiques résolutions de cette époque. Ledru-Rollin a été toujours, comme un riche bourgeois qu’il est, comme un rhéteur et comme avocat, et il reste encore l’ennemi naturel, instinctif du socialisme révolutionnaire. Aujourd’hui, après de grands efforts, il est enfin parvenu à comprendre les |19 associations coopératives, mais il ne se sent pas la force d’aller au-delà. Louis Blanc, ce Robespierre en miniature, cet adorateur du citoyen intelligent et vertueux, est le type du communiste de l’État, du socialiste doctrinaire et autoritaire. Il a écrit dans sa jeunesse une toute petite brochure sur « l’orga-