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cela même, est devenue désormais incapable de l’agiter et de l’électriser. Les Allemands, qui se croient aujourd’hui le premier peuple du monde, sont en arrière d’un demi-siècle au moins sur la France ; que dis-je ? il faut remonter bien plus loin encore pour trouver l’équivalent de la phase qu’ils traversent aujourd’hui. La Gazette officielle de Berlin leur montre dans un prochain avenir, comme récompense de leur dévouement héroïque, « l’établissement d’un grand empire tudesque, fondé sur la crainte de Dieu et sur la vraie morale ». Traduisez ceci en bon langage catholique, et vous aurez l’empire rêvé par Louis XIV. Leurs conquêtes, dont ils sont si fiers à présent, les feraient reculer de deux siècles ! Aussi tout ce qu’il y a d’intelligence honnête et vraiment libérale en Allemagne — sans parler des démocrates-socialistes — commence à s’inquiéter des conséquences des victoires nationales. Encore quelques semaines de sacrifices pareils à ceux que l’Allemagne a dû faire jusqu’ici moitié par force, moitié par exaltation, et la fièvre commencera à tomber ; le peuple allemand comptera ses pertes en hommes et en argent, il les comparera aux avantages obtenus, et alors le roi Guillaume et Bismark n’auront qu’à bien se tenir. Et c’est pour cela qu’ils sentent l’absolue nécessité de revenir victorieux et les mains pleines.

L’autre raison de la puissance inouïe développée actuellement par les Allemands, c’est l’excellence de leur machine administrative, excellence non au