Page:Bakounine - Œuvres t1.djvu/69

Cette page a été validée par deux contributeurs.

core faut-il se demander, si l’homme du peuple, vivant du jour au jour et nourrissant sa famille du travail de ses bras, privé lui-même d’instruction et de loisir, et forcé à se laisser assommer et abrutir par le travail pour assurer aux siens le pain du lendemain, — il faut se demander, s’il a seulement la pensée, le désir et même la possibilité d’envoyer ses enfants à l’école et de les entretenir pendant tout le temps de leur instruction ? N’aura-t-il pas besoin du concours de leurs faibles bras, de leur travail enfantin, pour subvenir à tous les besoins de sa famille ? Ce sera beaucoup s’il pousse le sacrifice jusqu’à les faire étudier, un an ou deux, leur laissant à peine le temps nécessaire pour apprendre à lire, à écrire, à compter et à se laisser empoisonner l’intelligence et le cœur par le catéchisme chrétien, qu’on distribue sciemment et avec une si large profusion dans les écoles populaires officielles de tous les pays. Ce peu d’instruction sera-t-il jamais en état d’élever les masses ouvrières au niveau de l’intelligence bourgeoise ? L’abîme sera-t-il comblé ?

Il est évident que la question si importante de l’instruction et de l’éducation populaires dépend de la solution de cette autre question bien autrement difficile d’une réforme radicale dans les conditions économiques actuelles des classes ouvrières. — Relevez les conditions du travail, rendez au travail tout ce qui