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une commune, un village. Au commencement de l’histoire, comme aujourd’hui chez les peuples sauvages, il n’y avait point de nation, ni de langue nationale ni de culte national, — il n’y avait donc pas de patrie dans le sens politique de ce mot. Chaque petite localité, chaque village avait sa langue particulière, son dieu, son prêtre ou son sorcier, et n’était rien qu’une famille multipliée, élargie, qui s’affirmait en vivant, et qui, en guerre avec toutes les autres tribus, niait par son existence tout le reste de l’humanité. Tel est le patriotisme naturel dans son énergique et naïve crudité.

Nous retrouverons encore des restes de ce patriotisme même dans quelques-uns des pays les plus civilisés de l’Europe, en Italie, par exemple, surtout dans les provinces méridionales de la péninsule italienne, où la configuration du sol, les montagnes et la mer, créant des barrières entre les vallées, les communes et les villes, les sépare, les isole et les rend à peu près étrangères l’une à l’autre. Proudhon, dans sa brochure sur l’unité italienne, a observé avec beaucoup de raison que cette unité n’était encore qu’une idée, une passion toute bourgeoise et nullement populaire ; que les populations des campagnes au moins y sont restées jusqu’à cette heure en très grande partie étrangères, et j’ajouterai hostiles, parce que cette unité se met en contradiction, d’un côté, avec leur