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faudra une révolution bien autrement profonde que toutes celles qui ont ébranlé jusqu’ici l’ancien et le nouveau monde.

En Suisse, malgré toutes les révolutions démocratiques qui s’y sont accomplies, c’est encore toujours la classe aisée, la bourgeoisie, c’est-à-dire la minorité privilégiée sous le rapport de la fortune, du loisir et de l’instruction, qui gouverne. La souveraineté du peuple, — mot que nous détestons d’ailleurs parce qu’à nos yeux toute souveraineté est détestable — le gouvernement des masses par elles-mêmes, y est également une fiction. Le peuple est souverain de droit, non de fait, car absorbé forcément par son travail quotidien, qui ne lui laisse aucun loisir, et sinon tout à fait ignorant, au moins très inférieur par son instruction à la classe bourgeoise, il est forcé de remettre aux mains de cette dernière sa prétendue souveraineté. Le seul avantage qu’il en retire, en Suisse comme dans les États-Unis de l’Amérique du Nord, c’est que les minorités ambitieuses, les classes politiques n’y peuvent arriver autrement au pouvoir qu’en lui faisant la cour, en flattant ses passions passagères, quelquefois fort mauvaises, et en le trompant le plus souvent.

Qu’on ne pense pas que nous voulons faire par là la critique du gouvernement démocratique au profit de la monarchie. Nous sommes fermement convain-