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plus est, une méchante fiction ! Une indigne supercherie ! car il suppose que, alors que je n’étais en état ni de vouloir ni de penser, ni de parler — parce que je me suis laissé tondre sans protester, j’ai pu consentir, pour moi-même, et pour ma descendance tout entière, à un éternel esclavage !

Les conséquences du contrat social sont en effet funestes, parce qu’elles aboutissent à l’absolue domination de l’État. Et pourtant le principe, pris au point de départ, semble excessivement libéral. Les individus, avant de former ce contrat, sont supposés jouissants d’une absolue liberté, car d’après cette théorie, l’homme naturel, l’homme sauvage est le seul qui soit complètement libre. Nous avons dit ce que nous pensons de cette liberté naturelle, qui n’est rien que l’absolue dépendance de l’homme gorille vis-à-vis de l’obsession permanente du monde extérieur. Mais supposons qu’il soit réellement libre à son point de départ, pourquoi alors se formerait-il en société ? Pour assurer, répond-on, sa sécurité contre tous les envahissements possibles de ce même monde extérieur, y compris d’autres hommes, associés ou non associés, mais qui n’appartiendraient pas à cette nouvelle société qui se forme.

Voilà donc les hommes primitifs, absolument libres, chacun en lui-même et par lui-même, et qui ne jouissent de cette liberté illimitée qu’autant qu’ils ne