Page:Bakounine - Œuvres t1.djvu/174

Cette page a été validée par deux contributeurs.

jet, en fait naturellement l’âme de tout l’univers — Dieu.

C’est ainsi que le vrai Dieu, — l’être universel, éternel, immuable créé par la double action de l’imagination religieuse et de la faculté abstractive de l’homme, fut posé pour la première fois dans l’histoire. Mais du moment qu’il fut ainsi connu et posé, l’homme oubliant ou plutôt même ignorant sa propre action intellectuelle, qui seul l’avait créé et, ne se reconnaissant plus du tout dans sa création propre : l’abstractum universel, se mit à l’adorer. Les rôles aussitôt changèrent : le créé devint le créateur présumé et le véritable créateur, l’homme prit sa place parmi tant d’autres créatures misérables, comme une pauvre créature à peine quelque peu privilégiée.

Une fois Dieu posé, le développement successif et progressif des différentes théologies s’explique naturellement, comme le reflet du développement de l’humanité dans l’histoire. Car du moment que l’idée d’un être extraordinaire et suprême s’est emparée de l’imagination de l’homme et s’est établie dans sa conviction religieuse, au point que la réalité de cet être lui apparaît plus certaine que celle des choses réelles qu’il voit et qu’il touche de ses doigts, — il devient naturel, nécessaire, que cette idée devienne le fond principal de toute l’humaine existence, qu’elle la modifie, la pénètre et la domine exclusivement et d’une